Sophie Cohen Ben-Dror, la fille de l’espion Eli Cohen au Monde Juif .info : « J’ai bon espoir qu’un jour nous pourrons ramener mon père en Israël »
Fille d’Eli Cohen, espion et héros national en Israël, Sophie Cohen Ben-Dor essaie de rétablir la vérité sur son père dans un livre coécrit avec la journaliste d’I24 News, Valérie Perez-Ennouchi. Les deux femmes s’appuient sur de nouveaux documents, 58 ans après son exécution en place publique à Damas pour avoir infiltré le régime syrien au plus haut niveau.
Beaucoup de livres sur votre père ont déjà été écrits. Pourquoi avez-vous finalement choisi de coécrire ce livre avec Valérie ?
Tout d’abord c’est une belle rencontre avec Valérie, ensuite la plupart des informations données dans des livres n’étaient pas tout à fait exactes. L’idée c’était de dire la vérité, ma vérité. Il y a beaucoup de choses que je ne sais pas mais quand je me suis mis à chercher ,je n’ai pas eu peur de savoir ce que j’allais trouver.
On est bouleversé dans ce livre d’apprendre comment votre famille a vécu à la limite de la pauvreté. Votre père ne gagnait presque rien alors qu’il réalisait de grandes choses pour Israël. Comment expliquez-vous ce traitement ?
Il faut remettre les choses dans le contexte de l’époque. Israël est un nouveau pays. Il n’y avait pas du tout de règles pour encadrer le statut d’espion. Il n’était pas soldat. Il a créé un précédent. À la suite de la mort de mon père, Israël a commencé à mettre au point des réglementations pour dédommager les espions. Tout ça, c’est grâce à mon père que finalement les choses ont changé.
Estimez-vous toujours que le Mossad ne dit pas la vérité sur les circonstances qui ont mené à l’arrestation de votre père ?
Ils ne savent pas comment il a été recruté. Ils ne savent pas non plus comment il a été arrêté. En plus de ça, ils m’ont dit, il y a quelques temps, que les dossiers sur mon père ont été brûlés. Je pense vraiment que le Mossad cache des choses.
Vous avez par deux fois écrit au Président syrien Bachar el-Assad pour qu’il rende à votre famille la dépouille de votre père. Il vous à répondu par deux fois, en vain. Les contacts avec lui sont-ils définitivement rompus ?
Il n’y a plus trop d’espoir avec lui. Nous avions bon espoir également avec Poutine mais malheureusement, avec la guerre en Ukraine, ces espoirs se sont envolés. À présent, nous essayons d’obtenir une médiation des Émirats arabes unis.
Est-ce que ces démarches, passées, présentes et futures, sont coordonnées avec Israël ?
Avec Bachar el-Assad, ce fut une initiative personnelle. Israël n’était pas impliqué dans ces démarches. Cette fois, pour les Émirats arabes unis, nous nous sommes rapprochés du Mossad. J’ai bon espoir qu’un jour nous pourrons ramener notre père au pays.
Quel legs votre père a-t-il laissé selon vous aux nouvelles générations d’espions d’Israël ?
Israël a notamment créé et nommé une école d’espion en hommage à mon père. Depuis mon père, les espions peuvent également révéler à leur conjoint leur statut d’espion.
Eli Cohen, Le héros du Mossad – Éditions Ramsay – 180 pages
Propos recueillis par Yohann Taïeb | Le Monde Juif .info | Photo : DR